jeudi 22 mai 2014

Tattoo


Au fur et à mesure que l’aiguille vibre et pénètre la chair, les deux premières questions reviennent en mémoire. Où et quoi. Ce furent les premières questions. Paradoxalement plus difficiles à trancher que la toute première, celle avant dire droit¸ celle du principe même d’une marque indélébile qui serait apposée sur son corps.

Cela faisait partie de ce qu’il allait lui demander. Il l’avait évoqué au début de leurs échanges, elle le savait. Elle savait ce besoin de possession complet et exclusif, elle savait cette fierté larvée qui lui ferait demander une marque, elle savait qu’elle finirait dans cet atelier de tatouage.

Se déshabiller, se montrer quasi nue au tatoueur ne serait qu’une formalité. Elle ne le verrait même pas, ne pensant qu’à lui et brulant du désir de le satisfaire. D’être sienne et de le porter non plus en elle mais bien sur elle. Elle n’avait pas espéré porter ses armes alors, au moins, trouvait elle sa satisfaction dans le port de sa marque. Elle savait qu’il marquait d’un timbre à sec ses ouvrages préférés et se sentait à la fois objet et si vivante en s’inscrivant dans cette continuité de ce qui lui était précieux.

Elle ne s’était même pas dit en franchissant la porte de l’atelier que le tatoueur en avait certainement « vu d’autres », sa seule crainte étant qu’il réalise le travail le plus parfaitement possible. L’inspection serait sans faille car l’importance trop évidente. On porte des marques comme des cicatrices, celle-ci serait comme un blason, dorénavant une partie d’elle et de son orgueil.

Où et quoi, donc. Questions délicates auxquelles il avait réfléchi longtemps.

Où était la question la plus complexe des deux. Il fuyait l’ostentation et savourait le plaisir d’une discrétion subtile, dans sa vie et dans sa mise. Il fallait donc qu’il puisse y avoir accès facilement, sans pour autant que ce le soit pour autrui. Il avait passé en revue les positions et gestes de sa vie quotidienne avant d’arrêter son choix. Il devait en jouir en seul maître mais souhaitait qu’elle puisse également en profiter ou lui rappeler sa condition. Le bas du pubis, un peu au-dessus de l’aine avait donc été retenu.

Le quoi avait été assez simple, il s’agissait de son chiffre.

Le tout lui avait été envoyé sur un simple bristol blanc. Quelques mots d’instructions lui indiquant ce qu’il convenait de faire réaliser (cette signature embossée sur le bristol), l’endroit où il convenait de le faire réaliser. Quelques mots enfin venaient compléter ces instructions, lui indiquant des dates auxquelles il se déplacerait pour constater la complète et « opérationnelle » réalisation de sa demande.

Elle avait donc opéré un rétroplanning et il ne lui restait que peu de temps avant qu’il ne soit là et puisse profiter de cette marque, tout à fait nette et cicatrisée.

Il lui avait laissé un temps de réflexion compte tenu de l’enjeu de son inaliénabilité mais elle avait préféré le mettre à profit pour rechercher le meilleur artisan disponible dans sa région. Des heures à vérifier des avis internet et de presque faire du démarchage en porte à porte. Passer d’un collier virtuel ou physique à temps partiel à un collier d’encre niché dans les replis de son être lui semblait tellement d’une telle évidence qu’elle n’avait même pas cillé en lisant la carte. Elle avait même jugé nécessaire de le remercier de cette excellente idée et de l’l’hommage qui lui était rendu. Il avait apprécié

Ce temps qui file et la précision du geste de l’artisan étaient ses seules réelles préoccupations, loin devant sa posture digne d’une salle d’examen gynécologique ou le caractère incongru qu’on aurait pu trouver à cette demande.

Quelques minutes encore et la voici qui sort de « l’atelier ». A la fois la même et dorénavant une autre. Elle s’appartenait il y a encore une heure et n’a plus cette exclusivité dorénavant.

Elle porte sa marque, indélébile, comme on porte le drapeau de sa fierté.

Quelques minutes de trajets encore puis le contentement des touches du clavier d’ordinateur en lui envoyant ces simples mots «  c’est fait. ».

Ainsi commence pour elle une vie d’accompagnement et surtout de longues heures avant de se présenter devant lui, humble et fière à la fois, se découvrant une force nouvelle héritée de simples gouttes d’encre.

Un réveil


Tu places ton corps perpendiculaire au mien, ton cul à porter de ma main.

Tu me fais bander, avec ta bouche, ta langue et tes mains.

Tu montes sur moi et attends le dernier moment pour savoir si tu auras le droit de jouir ou pas.

Tu me fais jouir dans ta bouche.

Tu aspires jusque la dernière goutte.

Tu descends préparer mon café.